Monday, December 23, 2024

Nicaragua vs. Colombie : quelques réfléxions concernant la décision de la CIJ

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Par Nicolas Boeglin, Professeur de Droit International Public, Faculté de Droit, Universidad de Costa Rica (UCR)

Dans sa décision rendue publique le 21 avril dernier (voir texte intégral en anglais et en  français ), la Cour Internationale de Justice (CIJ) a ordonné à la Colombie de cesser toute interférence dans les zones correspondant au Nicaragua dans la mer des Caraïbes depuis sa décision de 2012, et de modifier les régulations qu’elle avait pris, conformément au contenu de son arrêt du 19 novembre 2012 et au droit international coutumier.

Nous avions eu l’occasion d’analyser cette procédure contentieuse engagée par le Nicaragua contre la Colombie devant la justice internationale en novembre 2013, et de mentionner certains détails passés sous silence par certains analystes et collègues colombiens, notamment l’expérience de l’équipe juridique nicaraguayenne dans l’art du contentieux international par rapport à celle de leurs homologues défendant la Colombie (voir notre brève note  en espagnol intitulée : ” Nicaragua / Colombia: a propósito de la lectura de la sentencia de la CIJ  “).

Le jeu de cartes de cette note avec une première carte illustrant les zones maritimes revendiquées par la Colombie avant 2012 et une seconde carte de la décision de la CIJ de 2012 permet au lecteur non averti de mieux comprendre la portée de la décision de 2012 pour le Nicaragua dans les Caraïbes.

Il est à noter que la plus haute autorité colombienne et l´ensemble de son cabinet ont décidé de se rendre sur l’île de San Andrés pour y entendre la lecture du jugement rendu à La Haye le 21 avril dernier (voir note de presse d´Infobae).

Le contenu de la décision en bref

Comme somme toute assez prévisible, les arguments présentés par la Colombie n’ont pas eu beaucoup d’effet, tandis que le Nicaragua a réussi à consolider et à réaffirmer ses droits sur ces zones maritimes, qui lui ont été accordés par la CIJ en 2012, grâce à cet arrêt.  

Les attentes (fausses) créées ces derniers temps en Colombie, notamment à l’égard des communautés insulaires des Raizales, devront maintenant être expliquées par ceux qui en sont responsables au sein de l´opinion publique colombienne . Une situation très similaire avait d´ailleurs déjà été observée en Colombie dans les semaines précédant la lecture de l’arrêt de la CIJ en novembre 2012.

Sur les sept paragraphes du dispositif final de l arrêt, le tout dernier sur les lignes de base droites adoptées par le Nicaragua en 2013 et 2018 permet à la Colombie d’éviter un jugement qui la condamnerait sur l´ensemble du dispositif.

Le dernier point du dispositif final (paragraphe 261) est reproduit ci-dessous, dans lequel il est indiqué que la CIJ :

“1. Dit que la compétence qu’elle a, sur le fondement de l’article XXXI du pacte de Bogotá, pour statuer sur le différend relatif à des allégations de violations, par la République de Colombie, des droits de la République du Nicaragua dans les espaces maritimes que la Cour a reconnus à cette dernière dans son arrêt de 2012, couvre les demandes fondées sur les événements mentionnés par la République du Nicaragua survenus après le 27 novembre 2013, date à laquelle le pacte de Bogotá a cessé d’être en vigueur pour la République de Colombie ; 

2. Dit que, en entravant les activités de pêche et de recherche scientifique marine de navires battant pavillon nicaraguayen ou détenteurs d’un permis nicaraguayen et les opérations de navires de la marine nicaraguayenne dans la zone économique exclusive de la République du Nicaragua et en voulant faire appliquer des mesures de conservation dans cette zone, la République de Colombie a violé les droits souverains et la juridiction de la République du Nicaragua dans cette zone maritime; 

3. Dit que, en autorisant des activités de pêche dans la zone économique exclusive de la République du Nicaragua, la République de Colombie a violé les droits souverains et la juridiction de la République du Nicaragua dans cette zone maritime 

4. Dit que la République de Colombie doit immédiatement cesser le comportement visé aux points 2) et 3) ci-dessus 

5. Dit que la «zone contiguë unique» établie par la République de Colombie par le décret présidentiel 1946 du 9 septembre 2013, tel que modifié par le décret 1119 du 17 juin 2014, n’est pas conforme au droit international coutumier, ainsi qu’exposé aux paragraphes 170 à 187 ci-dessus ; 

6. Dit que la République de Colombie doit, par les moyens de son choix, mettre les dispositions du décret présidentiel 1946 du 9 septembre 2013, tel que modifié par le décret 1119 du 17 juin 2014, en conformité avec le droit international coutumier, en tant qu’elles ont trait aux espaces maritimes que la Cour a reconnus à la République du Nicaragua dans son arrêt de 2012 ; 

7. Dit que les lignes de base droites de la République du Nicaragua établies par le décret no 33-2013 du 19 août 2013, tel que modifié par le décret no 17-2018 du 10 octobre 2018, ne sont pas conformes au droit international coutumier“.

Une lecture complète de l´ensemble de l´arrêt est recommandée afin de mieux apprécier le raisonnement suivi par les juges de la CIJ, mais aussi de mieux comprendre la facilité avec laquelle le Nicaragua a réussi à les convaincre de la faiblesse des arguments présentés par la Colombie.

Photo de la rencontre entre les présidents colombien et nicaraguayen suite à l’arrêt de la CIJ de novembre 2012, qui s’est tenue au Mexique, lors de l’investiture du président Peña Nieto en décembre 2012, extraite de ce communiqué de presse d’Infobae intitulé “Ortega y Santos se reunieron por el fallo de la CIJ”, édition du 1/12/2012.

De quelques points de détail

A noter que le seul juge de la CIJ originaire d’Amérique Latine (Antonio Cançado Trindade, Brésil) n’a pas pris part à cette décision, pour des raisons qui ne sont pas expliquées dans l’arrêt. Le premier jour des audiences tenues en septembre 2021 (voir le verbatim), la Présidente de la CIJ a indiqué que: “For reasons duly made known to me, Judge Cançado Trindade is unable to sit with us in these oral proceedings, either in person or by video link” (page 12). Le fait qu’un juge en exercice à la CIJ ne juge pas soulève toujours quelques questions, que nous avons également eu l’occasion de relever a l´occasion de la récente ordonnance de la CIJ à la Russie exigeant qu’elle cesse immédiatement son agression militaire contre l’Ukraine en mars 2022 (Note 1).

Il convient de noter, en ce qui concerne le point 7 précité, que la Colombie n’a pas vraiment expliqué comment cela affectait ses droits dans la zone économique exclusive (ZEE), un détail que le juge Mohamed Bennouna (Maroc) considère comme suffisant pour que la CIJ rejette la demande de la Colombie ; et qui maintenant, selon lui, crée un dangereux précédent pour la CIJ à l’avenir, du fait de l´existence dans le monde d’innombrables décrets unilatéraux fixant des lignes de base droites pour délimiter la mer territoriale (Note 2) qui ne respectent pas toujours les dispositions de la Convention sur le Droit de la Mer de 1982 (voir le texte de sa déclaration).  Soit dit en passant, la Colombie n’a pas encore ratifié cet instrument universel (voir l’état officiel des signatures et des ratifications) : en Amérique Latine, outre la Colombie, seul le Salvador partage cette situation, ainsi que le Venezuela (qui ne l’a même pas signé).

En ce qui concerne les prétendus droits de pêche artisanale de la communauté des Raizales défendus par la Colombie devant le juge, le paragraphe 231 du jugement est on ne peut plus clair :

“231. Pour ces motifs, la Cour conclut que la Colombie n’a pas établi que les habitants de l’archipel de San Andrés, notamment les Raizals, jouissent de droits de pêche artisanale dans les eaux situées à présent dans la zone économique exclusive nicaraguayenne, ou que le Nicaragua a, par les déclarations unilatérales de son président, accepté ou reconnu l’existence de leurs droits de pêche traditionnels, ou pris l’engagement juridique de respecter de tels droits. Au vu de cette conclusion, point n’est besoin pour elle d’examiner les arguments des Parties quant au point de savoir si et dans quelles circonstances les droits de pêche traditionnels d’une communauté donnée peuvent survivre à la création de la zone économique exclusive d’un autre Etat, non plus que les violations desdits droits que le Nicaragua, selon la Colombie, aurait commises du fait du comportement de ses forces navales“.

Les paragraphes 219 à 224 donnent un idée des diverses inconsistances provenant des autorités colombiennes elles-mêmes sapant le bien-fondé des arguments avancés par leurs conseillers juridiques à La Haye : des incohérences qui ont, bien entendu, été fort habilement exploitées par leurs homologues défendant le Nicaragua.

Quelques perspectives après cet arrêt

La pratique enseigne qu’après la lecture d’un arrêt de la CIJ entre deux États, les chefs d’État des deux pays peuvent commencer à explorer une sorte de rapprochement, arrêt en main, afin de reconstruire progressivement leurs relations bilatérales, souvent fort détériorées.  En Amérique latine, c’est ce qu’ont fait le Salvador et le Honduras en 1992 après avoir entendu un jugement de la CIJ mettant fin à leur long différend territorial (voir le texte de la déclaration conjointe), l’Argentine et l’Uruguay après une décision de la CIJ rendue en 2010 (voir l’article de la BBC), le Pérou et le Chili en janvier 2014 (voir l’article d’El Nuevo Siglo). Même les chefs d´Etat du Chili et de la Bolivie se sont réunis – très brièvement – en septembre 2015 lorsque la CIJ s’est déclarée compétente en rejetant les exceptions préliminaires présentées par le Chili (voir l´article de La Tercera).

De manière générale, on peut considérer que la lecture d’un arrêt de la CIJ sur le fond doit toujours être comprise comme le point d´aboutissement d’un processus et le début d’une nouvelle étape : en effet, pendant plusieurs années, les conseillers politiques et juridiques à La Haye des deux Etats ont construit une stratégie de confrontation, en élaborant des griefs et des revendications devant le juge international, qu’ils ont évoquées devant leurs opinions publiques respectives pour les convaincre de la défense irréprochable des intérêts nationaux  qu´ils ont faite. Mais une fois le jugement rendu à La Haye, toutes ces discussions juridiques font partie du passé et en quelque sorte, s´effacent. Dans sa décision, le juge international a donné gain de cause sur certains points de droit à un État et d’autres à l’autre Etat, rejetant certains des griefs de l’un mais aussi de l’autre. C’est donc le texte de sa décision qui doit servir de base pour reconstruire leurs relations malmenées par des années de procédure à La Haye.

C´est dans cette perspective, qui explique l´équilibre subtile que le juge de La Haye cherche toujours à imprimer à ses décisions, que la reprise du dialogue au plus haut niveau constitue un espace politique naturel découlant de la lecture d’un arrêt de la CIJ entre deux Etats (exception faite – et assez remarquée – du Costa Rica et du Nicaragua). Ceci afin de tenter de normaliser progressivement leurs relations détériorées après plusieurs années de joutes juridiques à La Haye : comme tout espace politique, il est soumis aux aléas de la vie politique ; et surtout, à la capacité de saisir l´occasion qu´offre le juge international à deux Etats.

A cet égard, il convient de rappeler que peu après la lecture de l’arrêt du 19 novembre 2012, les chefs d´Etat de la Colombie et du Nicaragua ont eu l’occasion de se rencontrer à l’occasion de l’investiture du nouveau président du Mexique, Enrique Peña Nieto. 

La Colombie a ensuite choisi de hausser le ton et ses autorités ont offert au monde un spectacle rarement vu : celui d’un État profondément mécontent par le contenu d ´une décision de la CIJ et adoptant une attitude sans précédent. Quelques semaines après le jugement de novembre 2012, la Colombie a décidé de dénoncer le Pacte de Bogota adopté en 1948 (voir communiqué officiel), devenant ainsi le premier État au monde à dénoncer un instrument international emblématique portant le nom de … sa propre capitale.

Dans le cadre de cette attitude assez particulière, le Présidente de la Colombie a déclaré l’arrêt de la CIJ de 2012 ” inapplicable ” en septembre 2013 (Note 3), tendant de manière prévisible les relations avec le Nicaragua et conduisant les autorités de ce dernier à introduire deux nouvelles requêtes contre la Colombie devant la CIJ. 

Sur ce dernier point, il convient de noter que l´autre requête introduite par le Nicaragua en 2013 (voir les détails de la procédure dans ce lien officiel de la CIJ), également liée à la mer des Caraïbes, est toujours en attente de sa résolution. Des dates doivent encore être fixées pour les audiences orales entre les deux États à La Haye, qui constituent la dernière étape de la phase contradictoire de la procédure contentieuse : après quoi, des délibérations auront lieu jusqu´ à la lecture de l´arrêt. Il convient de noter que le délibéré de la CIJ est généralement de 6 mois mais peut prendre jusqu’à 13 mois (c’est ce qui s’est passé dans le cas de la délimitation maritime entre le Pérou et le Chili en 2014). Dans la toute première affaire opposant le Costa Rica au Nicaragua (voir détails procéduraux  et arrêt du 13 juillet 2009), la CIJ a surpris de nombreux observateurs avec un délibéré de seulement 4 mois.

L’existence de cette seconde affaire pendante entre le Nicaragua et la Colombie ne devrait pas servir de prétexte pour ne pas initier une phase de rapprochement au plan bilatéral. Les deux États peuvent désormais s’asseoir pour négocier sur les différents aspects de l’arrêt lu le 21 avril 2022. Il convient de rappeler que ce différend maritime entre la Colombie et le Nicaragua a débuté en 1980.

En guise de conclusion

À notre avis, la lecture d’un arrêt de la CIJ devrait toujours être célébrée, car elle consolide l’idée que la force du droit prévaut sur le droit de la force dans les relations entre deux États. Cette affirmation s´avère particulièrement pertinente en 2022 (et en particulier depuis le 24 février), année dans laquelle le monde assiste à une tentative de la Russie de faire prévaloir en Ukraine le droit de la force sur la force du droit, la conduisant à une véritable impasse.

On se doit de saluer la persévérance et la confiance du Nicaragua depuis 2001 dans la justice internationale face aux actions (plutôt inhabituelles) observées, notamment depuis novembre 2012, des autorités colombiennes : ces dernières devraient être en mesure de revoir leur stratégie, évaluer les résultats obtenus et adopter des mesures qui soient plus conformes avec ce qui a été clairement établi depuis 2012 par le juge de La Haye et réitéré une nouvelle fois en 2022.

Espérons que les plus hautes autorités des deux États chercheront un moyen de réorienter leurs relations vers des eaux moins turbulentes : en effet, le Nicaragua et la Colombie sont engagés depuis 21 ans dans des batailles juridiques complexes mais aussi fort coûteuses (Note 4) à La Haye relative à un différend que, d’ordinaire, deux États voisins en mer ayant la volonté de le résoudre, peuvent parfaitement régler par la voie de la négociation. 

Au passage, le Costa Rica (Note 5), mais aussi la Jamaïque et le Panama, qui avaient des traités bilatéraux de délimitation maritime avec la Colombie dans la Mer des Caraïbes (Note 6) devraient commencer à penser à adapter leurs traités de délimitation à une nouvelle réalité cartographique : en effet, depuis le mois de novembre 2012, (et malgré l’enthousiasme prononcé de la Présidente du Costa Rica en 2013 pour s´associer aux réclamations de la Colombie – voir article d’El Espectador), l’un de leurs voisins maritimes dans la mer des Caraïbes s’appelle le Nicaragua.

________________________

– – Notes  – –

Note 1:  Cf. BOEGLIN N., “Ucrania-Rusia: Corte Internacional de Justicia (CIJ) ordena medidas provisionales a Rusia“, DIPúblico, édition du 16/03/2022, disponible ici

Note 2 : Voir, par exemple, le cas du Décret Exécutif 18851-RE adopté par le Costa Rica en 1988 sur les lignes de base droites dans le Pacifique, qui a fait l’objet d’une note de protestation officielle des États-Unis en 1989  (les deux textes sont disponibles dans ce numéro de Limits in the Seas, une publication fort utile du Département d’État nord américain).

Nota 3: Cf. BOEGLIN N., “La décision de la Colombie de déclarer “non-applicable” l´arrêt de la CIJ: breves réflexions“, Université Laval (Canada), document disponible ici, ainsi que sur le site juridique spécialisé  en droit international en France Sentinelle (voir hyperlien).

Note 4 : Le coût exact d’une demande de La Haye, que ce soit pour l ´Etat demandeur ou pour l’État défendeur, est généralement une zone grise sur laquelle les États restent quelque peu imprécis.  Pour ce qui est de l´Amérique Latine, une presse un peu plus aguerrie et curieuse que la presse nicaraguayenne (ou costaricienne, ou hondurienne), comme la presse colombienne, a réussi à obtenir des chiffres sur les seuls honoraires perçus par les conseillers internationaux et nationaux pour définir la meilleure stratégie après l’arrêt Nicaragua-Colombie de 2012 (voir article de Semana) ; concernant les actions antérieures à 2012, le même média colombien a accédé à la liste des honoraires perçus par la vingtaine de juristes engagés par la Colombie (voir article). En Amérique latine, certaines informations ont circulé sporadiquement dans quelques médias : il est assez surprenant que ni les salles de rédaction, ni les organes chargés des finances publiques, ni les commentateurs, ni les partis d’opposition n’aient manifesté de curiosité sur ce sujet précis. Ainsi, en Argentine, il a été possible d’avoir accès au ” taux horaire ” des conseillers internationaux engagés pour traiter la demande uruguayenne (voir note de presse 2010). Dans le cas du Chili, en 2015, le Pouvoir Exécutif a dû reconnaître (contre sa volonté) avoir dépensé 20,3 millions de dollars pour faire face à la seule requête introduite par le Pérou devant la CIJ (voir note de presse). Une décision de la Cour suprême du Chili en janvier 2014 (voir texte) a annulé la décision judiciaire précédente ordonnant la divulgation de ces données, mettant ainsi en évidence la résistance de l’appareil judiciaire chilien à rendre certaines choses vraiment transparentes. Dans le cas de la Colombie, afin d’obtenir le retrait de la requête introduite par l’Équateur devant la CIJ relative aux épandages chimiques aériens en 2008, elle a choisi de déposer auprès de l’Équateur en 2013 la somme de 15 millions de dollars (qui comprend notamment les frais de l’Équateur dans la procédure devant la CIJ – voir le point 9 de l’accord entre la Colombie et l’Équateur du 9/09/2013). Le montant extrêmement précis indiqué par le contrôleur général de la République du Nicaragua de 6 169 029 dollars pour faire face à l’unique requête introduite alors par le Costa Rica en mai 2011 (voir l’article d’El Nuevo Diario) est, à notre avis, un indicateur à prendre en considération qui devrait être affiné et complété. Nous serions reconnaissants à nos chers lecteurs de nous envoyer le rapport détaillé concernant ce montant sur cette affaire précise qui s’est conclue en 2015, afin d’examiner les différends éléments contenus pour parvenir à ce chiffre (courriel : cursodicr(a)gmail.com) ; ou plus généralement, tout autre rapport officiel détaillé qu’ils pourraient avoir en leur possession concernant un autre État ayant plaidé à La Haye. En ce qui concerne le Costa Rica, le montant dépensé par l’État costaricien pour couvrir les frais de défense de ce que l´on peut appeler “instances à répétitions” contre le Nicaragua en 2005, 2010, 2014 et 2017, ainsi que pour faire face à la requête introduite par le Nicaragua contre le Costa Rica en 2011 en raison de la construction de la fameuse ” trocha fronteriza ” par le Costa Rica, reste inconnu. L’incapacité démontrée par le Costa Rica pour négocier le montant des dommages environnementaux causés par le Nicaragua sur l’île de Portillos que la CIJ avait retenu dans son arrêt de décembre 2015 (voir texte), invitant expressément les deux États à s’entendre sur le montant (paragraphe 142), a nécessité une deuxième étape procédurale : celle-ci ne s´est achevée qu´en février 2018 par un nouvel arrêt de la CIJ (voir texte), fixant un montant 15 fois inférieur à celui demandé par le Costa Rica (378.000 US$ contre les 6,7 millions de US$ réclamés par le Costa Rica). Nous renvoyons nos chers lecteurs à cette article en espagnol que nous avons rédigé sur cet arrêt de 2018 de la CIJ, intitulé ” Costa Rica- Nicaragua: apuntes sobre la compensación por daño ambiental en Isla Portillos fijada por la CIJ” publié sur le site de HablandoClaro (Costa Rica) et  à une analyse précédente également en espagnol publiée sur le site de l´OPALC de SciencesPo/Paris intitulée “Monto por daño causado en Isla Portillos oficializado por Costa Rica “.

Note 5 : Dans le cas du Costa Rica, il a été jugé plus opportun de profiter de l élan produit par les “instances à répétition” contre le Nicaragua concernant le fleuve San Juan caractérisant la période 2005-2017 pour demander à la CIJ en 2014 de déterminer la frontière maritime entre les deux (Costa Rica et Nicaragua) et ce dans les deux océans, affaire qui a été réglé par le juge international en février 2018 (voir l´arrêt de la CIJ).

Note 6 :  La carte indiquée dans cet article permet de mettre en lumière quelques aspects concernant la délimitation maritime de la Mer des Caraïbes en Amérique Centrale.  Dans le cas du Panama, il s’agit d’un traité signé avec la Colombie en 1976 (voir texte et carte disponibles dans ce numéro de Limits in the Seas). Dans le cas du Costa Rica, il s’agit d’un traité similaire de 1977 qui n’a jamais été ratifié par le Costa Rica (voir le texte et la carte disponibles dans ce numéro de Limits in the Seas) : les deux traités négociés par la Colombie ont été signés avant que la notion de zone économique exclusive (ZEE) ne soit consacrée en tant que telle dans la Convention sur le Droit de la Mer de 1982. Dans le cas de la Jamaïque, le traité signé avec la Colombie date de 1993 (voir texte) et les cartes (voir cartes et texte en annexe 2 – pp.12-15 de ce numéro de Limits in the Seas).

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