Par Nicolas Boeglin, Professeur de Droit International Public, Faculté de Droit, Universidad de Costa Rica (UCR)
Dans sa dĂ©cision rendue publique le 21 avril dernier (voir texte intĂ©gral en anglais et en français ), la Cour Internationale de Justice (CIJ) a ordonnĂ© Ă la Colombie de cesser toute interfĂ©rence dans les zones correspondant au Nicaragua dans la mer des CaraĂŻbes depuis sa dĂ©cision de 2012, et de modifier les rĂ©gulations qu’elle avait pris, conformĂ©ment au contenu de son arrĂȘt du 19 novembre 2012 et au droit international coutumier.
Nous avions eu l’occasion d’analyser cette procĂ©dure contentieuse engagĂ©e par le Nicaragua contre la Colombie devant la justice internationale en novembre 2013, et de mentionner certains dĂ©tails passĂ©s sous silence par certains analystes et collĂšgues colombiens, notamment l’expĂ©rience de l’Ă©quipe juridique nicaraguayenne dans l’art du contentieux international par rapport Ă celle de leurs homologues dĂ©fendant la Colombie (voir notre brĂšve note en espagnol intitulĂ©e : ” Nicaragua / Colombia: a propĂłsito de la lectura de la sentencia de la CIJ “).
Le jeu de cartes de cette note avec une premiÚre carte illustrant les zones maritimes revendiquées par la Colombie avant 2012 et une seconde carte de la décision de la CIJ de 2012 permet au lecteur non averti de mieux comprendre la portée de la décision de 2012 pour le Nicaragua dans les Caraïbes.
Il est Ă noter que la plus haute autoritĂ© colombienne et lÂŽensemble de son cabinet ont dĂ©cidĂ© de se rendre sur l’Ăźle de San AndrĂ©s pour y entendre la lecture du jugement rendu Ă La Haye le 21 avril dernier (voir note de presse dÂŽInfobae).
Le contenu de la décision en bref
Comme somme toute assez prĂ©visible, les arguments prĂ©sentĂ©s par la Colombie n’ont pas eu beaucoup d’effet, tandis que le Nicaragua a rĂ©ussi Ă consolider et Ă rĂ©affirmer ses droits sur ces zones maritimes, qui lui ont Ă©tĂ© accordĂ©s par la CIJ en 2012, grĂące Ă cet arrĂȘt.
Les attentes (fausses) créées ces derniers temps en Colombie, notamment Ă l’Ă©gard des communautĂ©s insulaires des Raizales, devront maintenant ĂȘtre expliquĂ©es par ceux qui en sont responsables au sein de lÂŽopinion publique colombienne . Une situation trĂšs similaire avait dÂŽailleurs dĂ©jĂ Ă©tĂ© observĂ©e en Colombie dans les semaines prĂ©cĂ©dant la lecture de l’arrĂȘt de la CIJ en novembre 2012.
Sur les sept paragraphes du dispositif final de l arrĂȘt, le tout dernier sur les lignes de base droites adoptĂ©es par le Nicaragua en 2013 et 2018 permet Ă la Colombie d’Ă©viter un jugement qui la condamnerait sur lÂŽensemble du dispositif.
Le dernier point du dispositif final (paragraphe 261) est reproduit ci-dessous, dans lequel il est indiqué que la CIJ :
“1. Dit que la compĂ©tence quâelle a, sur le fondement de lâarticle XXXI du pacte de BogotĂĄ, pour statuer sur le diffĂ©rend relatif Ă des allĂ©gations de violations, par la RĂ©publique de Colombie, des droits de la RĂ©publique du Nicaragua dans les espaces maritimes que la Cour a reconnus Ă cette derniĂšre dans son arrĂȘt de 2012, couvre les demandes fondĂ©es sur les Ă©vĂ©nements mentionnĂ©s par la RĂ©publique du Nicaragua survenus aprĂšs le 27 novembre 2013, date Ă laquelle le pacte de BogotĂĄ a cessĂ© dâĂȘtre en vigueur pour la RĂ©publique de Colombie ;
2. Dit que, en entravant les activitĂ©s de pĂȘche et de recherche scientifique marine de navires battant pavillon nicaraguayen ou dĂ©tenteurs dâun permis nicaraguayen et les opĂ©rations de navires de la marine nicaraguayenne dans la zone Ă©conomique exclusive de la RĂ©publique du Nicaragua et en voulant faire appliquer des mesures de conservation dans cette zone, la RĂ©publique de Colombie a violĂ© les droits souverains et la juridiction de la RĂ©publique du Nicaragua dans cette zone maritime;
3. Dit que, en autorisant des activitĂ©s de pĂȘche dans la zone Ă©conomique exclusive de la RĂ©publique du Nicaragua, la RĂ©publique de Colombie a violĂ© les droits souverains et la juridiction de la RĂ©publique du Nicaragua dans cette zone maritime
4. Dit que la République de Colombie doit immédiatement cesser le comportement visé aux points 2) et 3) ci-dessus
5. Dit que la «zone contiguĂ« unique» Ă©tablie par la RĂ©publique de Colombie par le dĂ©cret prĂ©sidentiel 1946 du 9 septembre 2013, tel que modifiĂ© par le dĂ©cret 1119 du 17 juin 2014, nâest pas conforme au droit international coutumier, ainsi quâexposĂ© aux paragraphes 170 Ă 187 ci-dessus ;
6. Dit que la RĂ©publique de Colombie doit, par les moyens de son choix, mettre les dispositions du dĂ©cret prĂ©sidentiel 1946 du 9 septembre 2013, tel que modifiĂ© par le dĂ©cret 1119 du 17 juin 2014, en conformitĂ© avec le droit international coutumier, en tant quâelles ont trait aux espaces maritimes que la Cour a reconnus Ă la RĂ©publique du Nicaragua dans son arrĂȘt de 2012 ;
7. Dit que les lignes de base droites de la RĂ©publique du Nicaragua Ă©tablies par le dĂ©cret no 33-2013 du 19 aoĂ»t 2013, tel que modifiĂ© par le dĂ©cret no 17-2018 du 10 octobre 2018, ne sont pas conformes au droit international coutumier“.
Une lecture complĂšte de lÂŽensemble de lÂŽarrĂȘt est recommandĂ©e afin de mieux apprĂ©cier le raisonnement suivi par les juges de la CIJ, mais aussi de mieux comprendre la facilitĂ© avec laquelle le Nicaragua a rĂ©ussi Ă les convaincre de la faiblesse des arguments prĂ©sentĂ©s par la Colombie.

De quelques points de détail
A noter que le seul juge de la CIJ originaire d’AmĂ©rique Latine (Antonio Cançado Trindade, BrĂ©sil) n’a pas pris part Ă cette dĂ©cision, pour des raisons qui ne sont pas expliquĂ©es dans l’arrĂȘt. Le premier jour des audiences tenues en septembre 2021 (voir le verbatim), la PrĂ©sidente de la CIJ a indiquĂ© que: “For reasons duly made known to me, Judge Cançado Trindade is unable to sit with us in these oral proceedings, either in person or by video link” (page 12). Le fait qu’un juge en exercice Ă la CIJ ne juge pas soulĂšve toujours quelques questions, que nous avons Ă©galement eu l’occasion de relever a lÂŽoccasion de la rĂ©cente ordonnance de la CIJ Ă la Russie exigeant qu’elle cesse immĂ©diatement son agression militaire contre l’Ukraine en mars 2022 (Note 1).
Il convient de noter, en ce qui concerne le point 7 prĂ©citĂ©, que la Colombie n’a pas vraiment expliquĂ© comment cela affectait ses droits dans la zone Ă©conomique exclusive (ZEE), un dĂ©tail que le juge Mohamed Bennouna (Maroc) considĂšre comme suffisant pour que la CIJ rejette la demande de la Colombie ; et qui maintenant, selon lui, crĂ©e un dangereux prĂ©cĂ©dent pour la CIJ Ă l’avenir, du fait de lÂŽexistence dans le monde d’innombrables dĂ©crets unilatĂ©raux fixant des lignes de base droites pour dĂ©limiter la mer territoriale (Note 2) qui ne respectent pas toujours les dispositions de la Convention sur le Droit de la Mer de 1982 (voir le texte de sa dĂ©claration). Soit dit en passant, la Colombie n’a pas encore ratifiĂ© cet instrument universel (voir l’Ă©tat officiel des signatures et des ratifications) : en AmĂ©rique Latine, outre la Colombie, seul le Salvador partage cette situation, ainsi que le Venezuela (qui ne l’a mĂȘme pas signĂ©).
En ce qui concerne les prĂ©tendus droits de pĂȘche artisanale de la communautĂ© des Raizales dĂ©fendus par la Colombie devant le juge, le paragraphe 231 du jugement est on ne peut plus clair :
“231. Pour ces motifs, la Cour conclut que la Colombie nâa pas Ă©tabli que les habitants de lâarchipel de San AndrĂ©s, notamment les Raizals, jouissent de droits de pĂȘche artisanale dans les eaux situĂ©es Ă prĂ©sent dans la zone Ă©conomique exclusive nicaraguayenne, ou que le Nicaragua a, par les dĂ©clarations unilatĂ©rales de son prĂ©sident, acceptĂ© ou reconnu lâexistence de leurs droits de pĂȘche traditionnels, ou pris lâengagement juridique de respecter de tels droits. Au vu de cette conclusion, point nâest besoin pour elle dâexaminer les arguments des Parties quant au point de savoir si et dans quelles circonstances les droits de pĂȘche traditionnels dâune communautĂ© donnĂ©e peuvent survivre Ă la crĂ©ation de la zone Ă©conomique exclusive dâun autre Etat, non plus que les violations desdits droits que le Nicaragua, selon la Colombie, aurait commises du fait du comportement de ses forces navales“.
Les paragraphes 219 Ă 224 donnent un idĂ©e des diverses inconsistances provenant des autoritĂ©s colombiennes elles-mĂȘmes sapant le bien-fondĂ© des arguments avancĂ©s par leurs conseillers juridiques Ă La Haye : des incohĂ©rences qui ont, bien entendu, Ă©tĂ© fort habilement exploitĂ©es par leurs homologues dĂ©fendant le Nicaragua.
Quelques perspectives aprĂšs cet arrĂȘt
La pratique enseigne qu’aprĂšs la lecture d’un arrĂȘt de la CIJ entre deux Ătats, les chefs d’Ătat des deux pays peuvent commencer Ă explorer une sorte de rapprochement, arrĂȘt en main, afin de reconstruire progressivement leurs relations bilatĂ©rales, souvent fort dĂ©tĂ©riorĂ©es. En AmĂ©rique latine, c’est ce qu’ont fait le Salvador et le Honduras en 1992 aprĂšs avoir entendu un jugement de la CIJ mettant fin Ă leur long diffĂ©rend territorial (voir le texte de la dĂ©claration conjointe), l’Argentine et l’Uruguay aprĂšs une dĂ©cision de la CIJ rendue en 2010 (voir l’article de la BBC), le PĂ©rou et le Chili en janvier 2014 (voir l’article d’El Nuevo Siglo). MĂȘme les chefs dÂŽEtat du Chili et de la Bolivie se sont rĂ©unis – trĂšs briĂšvement – en septembre 2015 lorsque la CIJ s’est dĂ©clarĂ©e compĂ©tente en rejetant les exceptions prĂ©liminaires prĂ©sentĂ©es par le Chili (voir lÂŽarticle de La Tercera).
De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, on peut considĂ©rer que la lecture d’un arrĂȘt de la CIJ sur le fond doit toujours ĂȘtre comprise comme le point dÂŽaboutissement d’un processus et le dĂ©but d’une nouvelle Ă©tape : en effet, pendant plusieurs annĂ©es, les conseillers politiques et juridiques Ă La Haye des deux Etats ont construit une stratĂ©gie de confrontation, en Ă©laborant des griefs et des revendications devant le juge international, qu’ils ont Ă©voquĂ©es devant leurs opinions publiques respectives pour les convaincre de la dĂ©fense irrĂ©prochable des intĂ©rĂȘts nationaux quÂŽils ont faite. Mais une fois le jugement rendu Ă La Haye, toutes ces discussions juridiques font partie du passĂ© et en quelque sorte, sÂŽeffacent. Dans sa dĂ©cision, le juge international a donnĂ© gain de cause sur certains points de droit à  un Ătat et d’autres à  l’autre Etat, rejetant certains des griefs de l’un mais aussi de l’autre. C’est donc le texte de sa dĂ©cision qui doit servir de base pour reconstruire leurs relations malmenĂ©es par des annĂ©es de procĂ©dure à La Haye.
CÂŽest dans cette perspective, qui explique lÂŽĂ©quilibre subtile que le juge de La Haye cherche toujours Ă imprimer Ă ses dĂ©cisions, que la reprise du dialogue au plus haut niveau constitue un espace politique naturel dĂ©coulant de la lecture d’un arrĂȘt de la CIJ entre deux Etats (exception faite – et assez remarquĂ©e – du Costa Rica et du Nicaragua). Ceci afin de tenter de normaliser progressivement leurs relations dĂ©tĂ©riorĂ©es aprĂšs plusieurs annĂ©es de joutes juridiques Ă La Haye : comme tout espace politique, il est soumis aux alĂ©as de la vie politique ; et surtout, Ă la capacitĂ© de saisir lÂŽoccasion quÂŽoffre le juge international Ă deux Etats.
A cet Ă©gard, il convient de rappeler que peu aprĂšs la lecture de l’arrĂȘt du 19 novembre 2012, les chefs dÂŽEtat de la Colombie et du Nicaragua ont eu l’occasion de se rencontrer Ă l’occasion de l’investiture du nouveau prĂ©sident du Mexique, Enrique Peña Nieto.
La Colombie a ensuite choisi de hausser le ton et ses autoritĂ©s ont offert au monde un spectacle rarement vu : celui d’un Ătat profondĂ©ment mĂ©content par le contenu d ÂŽune dĂ©cision de la CIJ et adoptant une attitude sans prĂ©cĂ©dent. Quelques semaines aprĂšs le jugement de novembre 2012, la Colombie a dĂ©cidĂ© de dĂ©noncer le Pacte de Bogota adoptĂ© en 1948 (voir communiquĂ© officiel), devenant ainsi le premier Ătat au monde Ă dĂ©noncer un instrument international emblĂ©matique portant le nom de … sa propre capitale.
Dans le cadre de cette attitude assez particuliĂšre, le PrĂ©sidente de la Colombie a dĂ©clarĂ© l’arrĂȘt de la CIJ de 2012 ” inapplicable ” en septembre 2013 (Note 3), tendant de maniĂšre prĂ©visible les relations avec le Nicaragua et conduisant les autoritĂ©s de ce dernier Ă introduire deux nouvelles requĂȘtes contre la Colombie devant la CIJ.
Sur ce dernier point, il convient de noter que lÂŽautre requĂȘte introduite par le Nicaragua en 2013 (voir les dĂ©tails de la procĂ©dure dans ce lien officiel de la CIJ), Ă©galement liĂ©e Ă la mer des CaraĂŻbes, est toujours en attente de sa rĂ©solution. Des dates doivent encore ĂȘtre fixĂ©es pour les audiences orales entre les deux Ătats Ă La Haye, qui constituent la derniĂšre Ă©tape de la phase contradictoire de la procĂ©dure contentieuse : aprĂšs quoi, des dĂ©libĂ©rations auront lieu jusquÂŽ Ă la lecture de lÂŽarrĂȘt. Il convient de noter que le dĂ©libĂ©rĂ© de la CIJ est gĂ©nĂ©ralement de 6 mois mais peut prendre jusqu’Ă 13 mois (c’est ce qui s’est passĂ© dans le cas de la dĂ©limitation maritime entre le PĂ©rou et le Chili en 2014). Dans la toute premiĂšre affaire opposant le Costa Rica au Nicaragua (voir dĂ©tails procĂ©duraux et arrĂȘt du 13 juillet 2009), la CIJ a surpris de nombreux observateurs avec un dĂ©libĂ©rĂ© de seulement 4 mois.
L’existence de cette seconde affaire pendante entre le Nicaragua et la Colombie ne devrait pas servir de prĂ©texte pour ne pas initier une phase de rapprochement au plan bilatĂ©ral. Les deux Ătats peuvent dĂ©sormais s’asseoir pour nĂ©gocier sur les diffĂ©rents aspects de l’arrĂȘt lu le 21 avril 2022. Il convient de rappeler que ce diffĂ©rend maritime entre la Colombie et le Nicaragua a dĂ©butĂ© en 1980.
En guise de conclusion
Ă notre avis, la lecture d’un arrĂȘt de la CIJ devrait toujours ĂȘtre cĂ©lĂ©brĂ©e, car elle consolide l’idĂ©e que la force du droit prĂ©vaut sur le droit de la force dans les relations entre deux Ătats. Cette affirmation sÂŽavĂšre particuliĂšrement pertinente en 2022 (et en particulier depuis le 24 fĂ©vrier), annĂ©e dans laquelle le monde assiste Ă une tentative de la Russie de faire prĂ©valoir en Ukraine le droit de la force sur la force du droit, la conduisant Ă une vĂ©ritable impasse.
On se doit de saluer la persĂ©vĂ©rance et la confiance du Nicaragua depuis 2001 dans la justice internationale face aux actions (plutĂŽt inhabituelles) observĂ©es, notamment depuis novembre 2012, des autoritĂ©s colombiennes : ces derniĂšres devraient ĂȘtre en mesure de revoir leur stratĂ©gie, Ă©valuer les rĂ©sultats obtenus et adopter des mesures qui soient plus conformes avec ce qui a Ă©tĂ© clairement Ă©tabli depuis 2012 par le juge de La Haye et rĂ©itĂ©rĂ© une nouvelle fois en 2022.
EspĂ©rons que les plus hautes autoritĂ©s des deux Ătats chercheront un moyen de rĂ©orienter leurs relations vers des eaux moins turbulentes : en effet, le Nicaragua et la Colombie sont engagĂ©s depuis 21 ans dans des batailles juridiques complexes mais aussi fort coĂ»teuses (Note 4) Ă La Haye relative Ă un diffĂ©rend que, d’ordinaire, deux Ătats voisins en mer ayant la volontĂ© de le rĂ©soudre, peuvent parfaitement rĂ©gler par la voie de la nĂ©gociation.
Au passage, le Costa Rica (Note 5), mais aussi la JamaĂŻque et le Panama, qui avaient des traitĂ©s bilatĂ©raux de dĂ©limitation maritime avec la Colombie dans la Mer des CaraĂŻbes (Note 6) devraient commencer Ă penser Ă adapter leurs traitĂ©s de dĂ©limitation Ă une nouvelle rĂ©alitĂ© cartographique : en effet, depuis le mois de novembre 2012, (et malgrĂ© l’enthousiasme prononcĂ© de la PrĂ©sidente du Costa Rica en 2013 pour sÂŽassocier aux rĂ©clamations de la Colombie – voir article d’El Espectador), l’un de leurs voisins maritimes dans la mer des CaraĂŻbes s’appelle le Nicaragua.
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– – Notes – –
Note 1: Cf. BOEGLIN N., “Ucrania-Rusia: Corte Internacional de Justicia (CIJ) ordena medidas provisionales a Rusia“, DIPĂșblico, Ă©dition du 16/03/2022, disponible ici.
Note 2 : Voir, par exemple, le cas du DĂ©cret ExĂ©cutif 18851-RE adoptĂ© par le Costa Rica en 1988 sur les lignes de base droites dans le Pacifique, qui a fait l’objet d’une note de protestation officielle des Ătats-Unis en 1989 (les deux textes sont disponibles dans ce numĂ©ro de Limits in the Seas, une publication fort utile du DĂ©partement d’Ătat nord amĂ©ricain).
Nota 3: Cf. BOEGLIN N., “La dĂ©cision de la Colombie de dĂ©clarer “non-applicable” lÂŽarrĂȘt de la CIJ: breves rĂ©flexions“, UniversitĂ© Laval (Canada), document disponible ici, ainsi que sur le site juridique spĂ©cialisĂ© en droit international en France Sentinelle (voir hyperlien).
Note 4 : Le coĂ»t exact d’une demande de La Haye, que ce soit pour l ÂŽEtat demandeur ou pour l’Ătat dĂ©fendeur, est gĂ©nĂ©ralement une zone grise sur laquelle les Ătats restent quelque peu imprĂ©cis. Pour ce qui est de lÂŽAmĂ©rique Latine, une presse un peu plus aguerrie et curieuse que la presse nicaraguayenne (ou costaricienne, ou hondurienne), comme la presse colombienne, a rĂ©ussi Ă obtenir des chiffres sur les seuls honoraires perçus par les conseillers internationaux et nationaux pour dĂ©finir la meilleure stratĂ©gie aprĂšs l’arrĂȘt Nicaragua-Colombie de 2012 (voir article de Semana) ; concernant les actions antĂ©rieures Ă 2012, le mĂȘme mĂ©dia colombien a accĂ©dĂ© Ă la liste des honoraires perçus par la vingtaine de juristes engagĂ©s par la Colombie (voir article). En AmĂ©rique latine, certaines informations ont circulĂ© sporadiquement dans quelques mĂ©dias : il est assez surprenant que ni les salles de rĂ©daction, ni les organes chargĂ©s des finances publiques, ni les commentateurs, ni les partis d’opposition n’aient manifestĂ© de curiositĂ© sur ce sujet prĂ©cis. Ainsi, en Argentine, il a Ă©tĂ© possible d’avoir accĂšs au ” taux horaire ” des conseillers internationaux engagĂ©s pour traiter la demande uruguayenne (voir note de presse 2010). Dans le cas du Chili, en 2015, le Pouvoir ExĂ©cutif a dĂ» reconnaĂźtre (contre sa volontĂ©) avoir dĂ©pensĂ© 20,3 millions de dollars pour faire face Ă la seule requĂȘte introduite par le PĂ©rou devant la CIJ (voir note de presse). Une dĂ©cision de la Cour suprĂȘme du Chili en janvier 2014 (voir texte) a annulĂ© la dĂ©cision judiciaire prĂ©cĂ©dente ordonnant la divulgation de ces donnĂ©es, mettant ainsi en Ă©vidence la rĂ©sistance de l’appareil judiciaire chilien Ă rendre certaines choses vraiment transparentes. Dans le cas de la Colombie, afin d’obtenir le retrait de la requĂȘte introduite par l’Ăquateur devant la CIJ relative aux Ă©pandages chimiques aĂ©riens en 2008, elle a choisi de dĂ©poser auprĂšs de l’Ăquateur en 2013 la somme de 15 millions de dollars (qui comprend notamment les frais de l’Ăquateur dans la procĂ©dure devant la CIJ – voir le point 9 de l’accord entre la Colombie et l’Ăquateur du 9/09/2013). Le montant extrĂȘmement prĂ©cis indiquĂ© par le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral de la RĂ©publique du Nicaragua de 6 169 029 dollars pour faire face Ă l’unique requĂȘte introduite alors par le Costa Rica en mai 2011 (voir l’article d’El Nuevo Diario) est, Ă notre avis, un indicateur Ă prendre en considĂ©ration qui devrait ĂȘtre affinĂ© et complĂ©tĂ©. Nous serions reconnaissants Ă nos chers lecteurs de nous envoyer le rapport dĂ©taillĂ© concernant ce montant sur cette affaire prĂ©cise qui s’est conclue en 2015, afin d’examiner les diffĂ©rends Ă©lĂ©ments contenus pour parvenir Ă ce chiffre (courriel : cursodicr(a)gmail.com) ; ou plus gĂ©nĂ©ralement, tout autre rapport officiel dĂ©taillĂ© qu’ils pourraient avoir en leur possession concernant un autre Ătat ayant plaidĂ© Ă La Haye. En ce qui concerne le Costa Rica, le montant dĂ©pensĂ© par l’Ătat costaricien pour couvrir les frais de dĂ©fense de ce que lÂŽon peut appeler “instances Ă rĂ©pĂ©titions” contre le Nicaragua en 2005, 2010, 2014 et 2017, ainsi que pour faire face Ă la requĂȘte introduite par le Nicaragua contre le Costa Rica en 2011 en raison de la construction de la fameuse ” trocha fronteriza ” par le Costa Rica, reste inconnu. L’incapacitĂ© dĂ©montrĂ©e par le Costa Rica pour nĂ©gocier le montant des dommages environnementaux causĂ©s par le Nicaragua sur l’Ăźle de Portillos que la CIJ avait retenu dans son arrĂȘt de dĂ©cembre 2015 (voir texte), invitant expressĂ©ment les deux Ătats Ă s’entendre sur le montant (paragraphe 142), a nĂ©cessitĂ© une deuxiĂšme Ă©tape procĂ©durale : celle-ci ne sÂŽest achevĂ©e quÂŽen fĂ©vrier 2018 par un nouvel arrĂȘt de la CIJ (voir texte), fixant un montant 15 fois infĂ©rieur Ă celui demandĂ© par le Costa Rica (378.000 US$ contre les 6,7 millions de US$ rĂ©clamĂ©s par le Costa Rica). Nous renvoyons nos chers lecteurs Ă cette article en espagnol que nous avons rĂ©digĂ© sur cet arrĂȘt de 2018 de la CIJ, intitulĂ© ” Costa Rica- Nicaragua: apuntes sobre la compensaciĂłn por daño ambiental en Isla Portillos fijada por la CIJ” publiĂ© sur le site de HablandoClaro (Costa Rica) et Ă une analyse prĂ©cĂ©dente Ă©galement en espagnol publiĂ©e sur le site de lÂŽOPALC de SciencesPo/Paris intitulĂ©e “Monto por daño causado en Isla Portillos oficializado por Costa Rica “.
Note 5 : Dans le cas du Costa Rica, il a Ă©tĂ© jugĂ© plus opportun de profiter de l Ă©lan produit par les “instances Ă rĂ©pĂ©tition” contre le Nicaragua concernant le fleuve San Juan caractĂ©risant la pĂ©riode 2005-2017 pour demander Ă la CIJ en 2014 de dĂ©terminer la frontiĂšre maritime entre les deux (Costa Rica et Nicaragua) et ce dans les deux ocĂ©ans, affaire qui a Ă©tĂ© rĂ©glĂ© par le juge international en fĂ©vrier 2018 (voir lÂŽarrĂȘt de la CIJ).
Note 6 : La carte indiquĂ©e dans cet article permet de mettre en lumiĂšre quelques aspects concernant la dĂ©limitation maritime de la Mer des CaraĂŻbes en AmĂ©rique Centrale. Dans le cas du Panama, il s’agit d’un traitĂ© signĂ© avec la Colombie en 1976 (voir texte et carte disponibles dans ce numĂ©ro de Limits in the Seas). Dans le cas du Costa Rica, il s’agit d’un traitĂ© similaire de 1977 qui n’a jamais Ă©tĂ© ratifiĂ© par le Costa Rica (voir le texte et la carte disponibles dans ce numĂ©ro de Limits in the Seas) : les deux traitĂ©s nĂ©gociĂ©s par la Colombie ont Ă©tĂ© signĂ©s avant que la notion de zone Ă©conomique exclusive (ZEE) ne soit consacrĂ©e en tant que telle dans la Convention sur le Droit de la Mer de 1982. Dans le cas de la JamaĂŻque, le traitĂ© signĂ© avec la Colombie date de 1993 (voir texte) et les cartes (voir cartes et texte en annexe 2 – pp.12-15 de ce numĂ©ro de Limits in the Seas).